Les libraires en parlent

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Librairie L’alternative (Neuilly-Plaisance)

❤COUP DE COEUR❤

Tout récit sur l’émancipation m’intéresse a priori.J’avoue avoir été d’abord sceptique regrettant que l’émancipation de l’héroïne soit psychologisante éludant les carcans sociaux mais ils sont bien là, en toile de fond, une ville, un appartement, un compagnon, dont l’héroïne finit par s’échapper.

Mais c’est surtout l’histoire d’une fuite onirique, une quête d’identité. D’abord en voiture, puis en auto-stop, enfin à travers champs, plus son dépouillement est grand plus l’héroïne renaît, devient elle-même. Le texte de Lou Darsan est fascinant, sa langue est organique, riche, précise, on a envie de lire à voix haute pour mieux en apprécier la poésie.Aucune sensation ne nous est épargnée, les cauchemars, la dépression violente puis la communion de l’héroïne avec la nature, liquide, caressante, odorante. Car il s’agit aussi d’une véritable ode à la nature luxuriante, d’un retour à la terre comme moyen d’échapper en beauté aux déterminismes sociaux, d’une arrachée belle ! Une invitation à prendre nous aussi un premier départ, puis d’autres échappées suivront, multiplions nos personnalités, étendons-nous, devenons enfin nous-mêmes. Un premier roman remarquable.

Réseau des médiathèques de Montpellier

Lou Darsan est nomade et écrivaine. Née en 1987, elle poursuit des études de Lettres Modernes puis exerce le métier de libraire quelques années. Elle publie des chroniques littéraires dans plusieurs revues en ligne ainsi que sur son site personnel, Les Feuilles volantes, où elle explore par ailleurs son rapport au paysage réel et mental, à travers l’impression, l’évocation de l’image et la modification du regard. L’Arrachée belle est son premier roman paru en août 2020 aux éditions La Contre Allée.

Au centre de cette histoire, il y a le corps d’une femme, ses hantises et ses obsessions, et il y a la nature. C’est l’histoire d’une échappée belle, d’une femme qui quitte, presque du jour au lendemain, tout ce qui déterminait son identité sociale. Elle sort de stase et se met en mouvement. Son départ est d’abord une pulsion, une sorte de fuite vers l’avant qui tient du road movie, avec de longues traversées de paysages en voiture, en auto-stop, puis à pied. De la fuite et l’errance du départ, cette échappée va se transformer en nomadisme et en un voyage vers la réalisation de soi.

L’Arrachée belle, c’est une échappatoire à une situation vécue comme oppressante : une vie de couple dont la violence réside dans l’absence de relation, dans le vide entre les corps, dans les non-dits, l’incompréhension, la distance qui se creuse. L’autrice a voulu faire ressentir la violence de ces quotidiens subis, cette perte de sens qui est devenue pour la femme une absence au monde et à elle- même, et que l’on nomme en psychologie un syndrome de déréalisation et de dépersonnalisation, une façon de s’extraire de ce qu’on ne peut pas supporter, symbolisée par l’absence de prénom de la narratrice.

La forme épouse et fluctue avec maîtrise selon l’évolution de l’état d’esprit de la narratrice. Dans ce roman, il y a la volonté de nommer précisément, de s’attacher aux détails, de rendre les sensations et la perception de la modification d’un corps en usant de champs lexicaux spécifiques. L’intime y est exploré avec sensibilité. La nature occupe une place prépondérante (géologie, zoologie, botanique) et les descriptions particulièrement évocatrices transcrivent avec précision toute sa diversité, voire son étrangeté. Enfin, jouant d’une forme de réalisme magique qui différencie peu le réel, les visions, les rêves ou les cauchemars, Lou Darsan arrive, malgré le peu d’informations dont le lecteur dispose sur le personnage, à générer l’empathie : on ne peut s’empêcher de se reconnaître en ce personnage énigmatique en pleine renaissance (un « corps domestique » qui « s’ensauvage »), comme si cette femme était la part de nous qui aimerait avoir le courage de se lancer, de tout abandonner, de partir, et surtout, d’être véritablement à l’écoute de soi.

L’Arrachée belle a été nominé pour plusieurs prix littéraires : le Prix Révélation de la SGDL, le Prix du premier roman des Inrockuptibles et le Prix du premier roman de la librairie L’Impromptu.

Source ici

Médiathèque de Messimy

Page 83 et 84 du Petit Aventaire Littéraire disponible ici

L’Arrachée belle est le premier roman de Lou Darsan sorti en juin 2020 aux éditions La Contre Allée. Il nous dévoile une figure de femme en état de dereliction au sein d’un couple dont la relation ne s’articule plus que sur du vide, qui est devenue étrangère à elle méme, ne peut plus percevoir le reel environnant qui a perdu tout sens pour elle que de manière diffractée et déformée. De jour en jour, coquille de plus en plus exsangue, elle ne semble plus portée que par une volonté d’effacement de sa personne. Jusqu’au soudain abandon du domicile conjugal. Une décision prise dans un état second, comme si une pulsion de survie en dehors d’elle était venue l’arracher à son quotidien délétére. C’est le début d’une fuite en voiture qui lui fait traverser des kilomètres de territoire et partir à la rencontre et à l’écoute de la nature qui l’accompagne dans un réveil à elle même. L’écriture de Lou Darsan possède la force de rendre palpable chaque sensation de son personnage en reconquête de son intériorité profonde. Resserrée, dense lorsque cette femme est angoissée, elle se déploie en phrases au souffle vif lorsque l’apaisement point. L’autrice nous a offert avec ce roman une première oeuvre qui possede l’étoffe d’une grande (une fois termine, on a envie de reprendre le texte juste pour le plaisir de relire certains passages) et qui laisse augurer une suite très prometteuse.

LA SÉLECTION DE L’INVITÉE

UN LIVRE

VALENCIA PALACE d’Annie Perreault (2020, Le Nouvel Attila)

Sur le toit de l’hôtel Valencia Palace, alors que Claire bronze sous un soleil blanc, une femme lui confie son sac et se jette du toit. Plus tard, hantée par ce saut, Claire retourne à Valencia et disparait. Sa fille, des années après tente de comprendre, et court Valencia Palace est une des lectures qui m’ont le plus marquée cette année : dès la première page et ces grains de beauté peints comme des têtes d’épingle enfoncés dans la cuisse, ce ciel brumeux d’un été trop chaud, Annie Perreault nous plonge dans une ambiance troublante, lynchéenne, terriblement belle, jusqu’au dernier souffle.

UN FILM

DAUGHTERS OF THE DUST de Julia Dash (1991)

Sur une ile au large de la Caroline du Sud, peuplée par quelques familles Gullah (une communauté indépendante d’anciens esclaves), dans un paysage de forêts, de marais et de plages sans fin, les histoires de trois femmes se croisent et leurs voix se mélent dans art du dialogue porté par une langue unique. Premier long métrage réalisé par une réalisatrice afro américaine, éloge de la sororité, Daughters of the Dust est un film étrange et onirique, d’une beauté singulière.

UNE CHANSON

« Sad Pony Guerrilla Girl », album A PROMISE, Xiu Xiu (2007)

«I like my neighborhood, and I like my gun – driving my little car, I am your girl and I will protect you. Histoire d’amour empêchée entre deux femmes qui s’aiment à l’arrière des voitures dans un quartier résidentiel, mélodie mélancolique et lancinante, aux sonorités bruitistes parfois perturbantes, « Sad Pony Guerrilla Girl » appartient à ce genre de chansons qui marquent dès la première écoute, au point de devenir obsédantes.

Radio Vinci

LA LIBRAIRIE L’ANGLE ROUGE À DOUARNENEZ

date 27/08/2020 – 09:08 | micro_reportage Francine Thomas

C’est un nouvel établissement qui va ouvrir ses portes courant septembre. Quatre libraires ont décidé de s’associer au sein d’une scop pour animer un lieu de d’échanges autour de la littérature.

Parmi leurs coups de coeur : L’Arrachée belle de Lou Darsan.

https://radio.vinci-autoroutes.com/article/la-librairie-l-angle-rouge-a-douarnenez-4028

Les Lisières

L’Arrachée belle : une errance comme une quête

Véritable invitation à changer de point de vue sur nos manières de vivre et de penser, ce roman, à la fois poétique et extrêmement précis et documenté, étonne d’abord, déroute ensuite et finit surtout par nous inspirer et nous ensorceler, gagnant en intensité au fil de ce voyage qu’est la lecture.

https://www.leslisieres.com/conseils/

Librairie Page et Plume, Limoges

Aurélie, libraire chez Page et Plume à Limoges

Merci pour la découverte de cette langue, cette écriture surprenante qui met en avant les impressions, les sensations, une forme de porosité, d’unité, de dialogue conscient avec ce qui entoure. Une fuite, un mouvement qui devient énergie fragile, un paradoxe aussi, redevenir pleinement soi loin de tout ce qui nous façonne, très intéressant. Une réflexion entre philosophie et poésie, métaphysique et littérature pure. C’est fascinant. Des images qui restent et hantent.

Furet du Nord

Guillaume, libraire au Furet du Nord, juré du prix Première plume.

Les tourments de l’âme et du corps; le voyage. Une femme est asphyxiée dans sa vie de couple; ensevelie par l’autre. Il faut parvenir à s’en arracher pour ne pas se noyer. Ultime pulsion d’un corps. Fuite. Le début d’une errance nécessaire. Une thématique très actuelle pour un texte qui noue, remue, interroge. On sent un besoin viscéral d’écriture chez Lou Darsan au travers de ce premier roman qui convoque les paysages de ses pérégrinations et l’onirisme d’une métamorphose presque chamanique où les rêves tourmentent son héroïne pour mieux la remettre debout. Une plume belle et vraie. »