Les libraires en parlent

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Librairie Le Monte en l’air (Paris)

Ça fait tellement longtemps que l’auteur, performeur belge Antoine Boute ne nous a pas rendu visite, des années, c’est donc une grande joie de le retrouver demain invité par Antoine Basile Mouton en première partie de sa rencontre.

Rencontre animée par Gabrielle Napoli, sans qui plusieurs soirées n’auraient pas eu lieu. Un grand merci à elle.

Antoine Mouton, Nom d’un animal, Editions La Contre Allée

Dans un texte à la fois critique et poétique, Antoine Mouton ne manque pas d’humour pour interroger le mot travail sous toutes ses coutures. Nourri cette fois de multiples rencontres à propos de cette activité souvent honnie, il poursuit une réflexion personnelle déjà à l’œuvre dans Chômage monstre (La Contre Allée, 2020).

Récit, documentaire, enquête, journal de rencontres… Nom d’un animal est un texte qui se joue des formes à l’image de la diversité des paroles entendues ici et là, mêlant ainsi subtilement le singulier au collectif. Les trouvailles langagières questionnent l’absurdité de certaines situations tout autant qu’elles viennent réactiver notre imaginaire et notre sens critique.

Dans Chômage monstre, Antoine Mouton nous avait déjà montré comment retrouver sa propre langue en quittant son travail. Il s’intéresse ici aux trajectoires de vies : de l’enfance à l’âge adulte, de nos héritages à nos constructions personnelles.

Librairie La Régulière (Paris)

Merveille absolue

Tout juste sortie et déjà lue 1 000 000 fois environ.

Librairie La Bouillotte (Saint-Jean-en-Royans)

Questionner l’absurdité du travail avec poésie et humour !

Nouveautés !

Simon, Librairie Immédiate (Charenton-le-Pont)

Du beau boulot !

Ici, Antoine Mouton interroge les mots, joue avec le langage, tourne en dérision le champ lexical de cette activité centrale de nos vies : le travail. Le poète se mue alors en chercheur pour disséquer l’insaisissable, les bribes de l’enfance, les souvenirs du père, l’altérité et, toujours, ce maudit travail.

Drôle, truculent, introspectif et carrément névrotique, « Nom d’un animal » joue sur l’hybridité de ses formes (poésie, récit, essai…) mais reste solidement ancré dans un seul territoire, celui de la très bonne littérature.

Xavier, Librairie Esperluette (Lyon)

« Les conversations rebondissaient d’une personne à l’autre. Sur le dos de l’animal que nous formions. Peut-être un âne. L’animal de l’enfance. »

Antoine Mouton revient ici avec un cinquième titre publié aux éditions La Contre Allée. Ce texte est composé d’une forme hybride qui emprunte tout à la fois au récit, à la poésie et au témoignage. L’auteur a commencé à écrire ce texte lorsqu’il s’est éloigné d’un emploi salarié de libraire. Il y traite de ce que le travail charrie comme représentations, images, réalités, expressions toutes faites (« Et voilà le travail »), mais la proposition excède la seule réflexion autour du travail, on y croise aussi son père, et des considérations établies à partir des présences-absences, des rencontres et d’un dialogue avec soi, par-dessus soi. À ce propos, Bérénice Bichat, dans un des derniers bookclub (émission radiophonique), tenait le propos suivant, « quand on s’adresse à soi-même, on le fait en vers libres », on est donc pas étonné que ce soit la forme prédominante de ce livre.

Le texte résiste à toute entreprise de catégorisation et c’est certainement très en phase avec ce que l’auteur annonce d’emblée « je chéris les espaces où je suis sans fonction ». C’est que l’auteur nous parle, comme à partir d’un ancrage impossible (« Si on me demande d’où je viens, je suis embêté car je ne suis pas né ailleurs ni très loin, et pourtant je n’y suis pas resté ») de plusieurs endroits à la fois (« il y a des endroits où je suis partout »), de plusieurs lieux (« j’ai vu le monde de plusieurs intérieurs, de mille hublots. J’ai toujours tout recommencé repris souffle et socle touché terres »). Il le fait à partir de son monde à lui, en cultivant une distance, « entre le monde et moi, de l’air, de l’eau, du langage » et à partir de plusieurs personnes (procédé rendu possible par l’insert de témoignages qui émaillent le récit). À partir de son enfance aussi (« quand on me demande d’où je viens, je réponds : d’enfance »).

Le travail s’avère être vite insaisissable (« le travail m’est tombé des mains, où avais-je la tête? » ; « Comme si le seul véritable travail avait été d’enfouir et perdre trace »), mais qu’importe, Antoine Mouton n’aime rien tant qu’entrer dans les mots, s’engager à travers eux (« langage m’engage, me dis-je »). Un tritureur des mots, « je voudrais dire chaque jour le même mot, et observer l’infime mouvement qui le broie, le déplace, le condamne ou le sacre. Lancer ce mot à travers un récit, pour voir ce qui lui arrive d’inattendu. Comme il se plie, résiste, se modifie. Comme il tombe en désuétude. L’accompagner. Changer avec lui ».

Explorer, « au fond du temps » leurs contours, leurs fissures, leurs accords, leurs écarts, leurs égarements, leurs débordements, leurs désuétudes, leurs « au-delà ». C’est ainsi qu’en retournant le travail comme une pierre, il retrouve trace de son père (« si j’avais soulevé le mot travail, j’aurais trouvé mon père. Mon père vivait sous le travail. Quand il rentrait à la maison, on ne le voyait pas. On voyait que le travail »).

Antoine Mouton semble plus de celleux qui entretiennent une distance amusée avec cette affaire de travail (« Ce que je préfère dans le travail, c’est d’en chercher un qui m’irait. Pourvu que ça ne m’arrive jamais. En fait je cherche un travail, mais ce n’est pas vrai »). On ne se l’imagine pas se faire des shoots aux phéromones du travail, et pendant son auscultation du mot travail, il s’allonge dedans, « question de patience et d’attention ».

Il positionne ici et là des bribes de questionnements, sans cesse à recommencer, ouverts sur la reprise : « Quand tu poses une question à une question, ça s’ouvre. » Tel un funambule, il aime « rester en suspens au-dessus des surfaces », histoire de se jouer des cases. Débusquer les pièges : « grand égarement, la langue. On attend l’inouï. Mais le quiproquo a pris sa place ».

Loin d’une leçon de chose qui ferait un détour par le tripalium, Antoine Mouton s’attache à faire dégorger le mot, rendre compte de ce que le travail fait faire, fait dire ou fait taire. À l’instar de ses amis « burn-outés » : « Le mot burn-out a privé mes amis de leur histoire. Ils disaient : j’ai fait un burn-out, et rien de plus. Ils n’entraient pas dans les détails. (…) J’ai l’impression que les gens qui se servent de ce mot sont en réalités employés par lui pour en faire la promotion. Qu’ils se mettent au service d’un phénomène, sans plus pouvoir atteindre ni nommer l’endroit en eux que le désastre est venu toucher. »

Le texte est également émaillé de réflexions sur le temps, « On n’est pas sûr de percevoir le temps dans l’ordre. On suit des lignes karstiques, brisées » ; le temps qui passe, qui court, qui saute, qui creuse, qui comble, il faudrait « se détacher du temps, entrer dans la durée. Flotter par-dessus la vie ». Le temps qu’on ne rattrapera pas : « quand j’ai compris mon père, c’était trop tard. (…) Je ne prendrai jamais mon père dans mes bras ».

Et cette réflexion qui affleure autour de la transmission du nom de famille, de la filiation, ce nom irréductible aux histoires de Panurge, d’Abraham, d’Ulysse. « Pas facile d’être un mouton particulier. Pas facile non plus d’être parmi les humains et pas seulement à part ou à côté ». Antoine Mouton prête attention aux noms qu’il donne, mais aussi au nom qu’il n’a pas choisi, qu’on lui a donné, à la naissance, qui lui a été transmis « Je porte le nom d’un animal, mais c’est d’abord celui de mon père » et qu’il transporte avec lui : « Je porte un nom. Je le trimballe à travers la vie ». Plus qu’une affaire de filiation, il s’agit est aussi d’une forme de réhabilitation et de conversation recommencée avec son père.

Quelques mots pourraient permettre d’esquisser l’entreprise à laquelle se livre, l’air de rien, Antoine Mouton : à partir du nom qui lui est propre et du mot travail, dessiner en poésie des figures communes, parler des gens, de ce qui ne va pas, nous faire réagir, nous faire sourire. Faire des liens, en toute singularité. Nous percuter comme la météorite avec Ann Hodges. Les idées sautent comme un mouton, et on essaie de rebondir avec. Ce texte est particulièrement réussi !

« Par l’écriture

je voudrais me débarrasser de la honte

pour me charger de la douleur.

Rétablir les circulations d’une peine à l’autre

-qu’une tristesse vienne en éclairer mille autres.

Et qu’aucune ne s’impose contre celle des autres.

Qu’aucune blessure ne cherche à se hisser sur la pointe des pieds,

comme un ministre trop petit. »

Librairie des Pertuis (Saint-Pierre-d’Oléron)

Parfois, résumer certains livres tend vers une impossibilité tant ils sont riches et variés, “Nom d’un animal” en fait parti.

C’est tout à la fois un essai, un récit, un témoignage, voir même un roman.

C’est tout à la fois social, dramatique, drôle, imaginaire, voir même piquant.

Cela commence par une description du travail, son implication dans notre vie, d’une possible intégration dans la société, du chantage au confort matériel.

Mais aussi,

“La souffrance du.

La fatigue du.

L’aliénation du.”

La possible perte qui conduit au chômage.

Antoine Mouton nous parle aussi de son nom, des gens, de la filiation, bref, du monde.

Un livre qu’on reprend, qu’on rouvre, qu’on picore en savourant des phrases teintées d’humour, en s’émouvant de paragraphes d’une poésie teintée d’amour, en lisant à voix hautes des pages entières pour faire partager au plus grand nombre l’intelligence de l’écrivain qui parle de notre société avec une plume qui gratte, mais toujours avec douceur.

Nom d’un animal – @antoinebasilemouton Antoine Mouton – @la_contre_allee

https://www.lespertuis.fr/…/9782376651666-nom-d-un…

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