L’élégance des livres par Evlyne Léraut
« C’est grâce aux Beatles que Fernán et moi sommes devenus amis. »
Un hymne à l’amitié, à la concorde, en expansion constante.
Le charme de franchir la ligne de crête d’un récit de jeunesse pétri de passions.
Une autobiographie qui semble sur le fil de la réalité, avec quelques touches de nuances qui nous touchent en plein cœur.
Tant « Faster » est vivifiant, formulé avec délectation.
Un lâcher de crayons de couleur à pleine vitesse.
Le déroulé à la première personne tout en délicatesse est savoureux.
Cette voix narratrice, d’un jeune garçon à Buenos Aires dans les années 1970 est une fenêtre ouverte sur une époque, dont on voit l’étendue qui va advenir.
Un film tout en couleurs, les idiosyncrasies, les habitus dans une plongée, au cœur des voûtes familiales et amicales.
La trame est en résonance. On ressent l’écriture qui tire à elle les plus beaux souvenirs.
L’un est en classe A, l’autre en B.
Ils vont faire connaissance dans une excursion commune. Partager en prime une sorte d’expérience unique, sociologique, et profondément humaine.
Deux classes emmêlées pour un long périple.
Fernán vient juste d’arriver dans le lycée. « Un condisciple importé d’Amérique du Nord ».
Ils vont s’apprécier. Fusionner dans les vastes apprentissages de la vie.
« Faster » prend place. Plus vite ou bien dans un ralenti où l’on prend le temps d’apprécier la célébration de ce texte qui excelle de ferveur, de douceur et de sentiments.
L’authenticité souveraine est une véritable analyse sociétale.
« Jusqu’à l’apparition de Fernán, telle une météorite, mon meilleur ami avait été un certain Lucas. »
Fernán navigue de classe A à la classe B, « comme un personnage inclassable. »
Le jeune narrateur et Fernán vont faire plus ample connaissance.
Unir leurs passions, quid des Beatles, de George Harrison. Ce dernier porte le titre de ce livre, à l’instar d’une synchronisation. Le mouvement en symbole, le filigrane d’un témoignage chaleureux.
L’apothéose du liant, la résurgence sublime, celle d’atteindre la rive qui va ouvrir au grand jour l’émoi de la vitesse.
La réelle et la mentale, la frénésie de vivre l’éclatante jeunesse dans son summum.
S’émanciper, s’initier par cette voie qui collabore à leurs mutations intérieures.
Créer un fanzine avec les moyens du bord. La simplicité, et l’humilité et l’exaltation de la curiosité.
Ces deux adolescents siamois, rayonnent de connivence.
Avancer plus loin, jusqu’à l’interview de Juan Manuel Fangio.
Le mythe, les courses à l’instar d’un défi, pousser plus loin le rythme de la vocation.
On aime l’approche de ces deux jeunes qui franchissent la ligne de leurs peurs.
Apprendre d’un grand sportif les valeurs humaines. L’identification des tactiques perfectibles.
«Il court, quand il est en tête, comme s’il était encore en train de courir après le leader.
Il court comme s’il contrôlait tout, en gardant le rythme, en exploitant rationnellement ces secondes d’avance avec lesquelles il semble né. »
Fangio est leur idole. Les jeunes garçons recueillent les confidences. Ils comprennent l’heure haute de parler avec une célébrité de la vitesse, de l’éthique, et des défis.
L’allure accélérée, frénétique, comprendre ce qui se joue ici.
La rencontre ultime qui œuvre à leurs mutations intérieures.
« Mon tempérament est pacifique, je ne suis pas du genre à me bagarrer. Fangio aurait pu le formuler. C’est George qui l’a dit dans une interview des années 1970. »
« Je regrette de ne pas avoir posé certaines questions cet après-midi là. Je regrette de ne pas lui avoir demandé, par exemple, s’il lui était arrivé de ressentir, avant une course, plus de peur que d’habitude ou une sorte de mauvais présage. »
Plus que des journalistes, dont l’adolescence est opérative et bénéfique à leurs élans pour demain. Ils rassemblent l’épars d’un temps où ils auront passé « près de neuf ans à écrire à quatre mains et à signer de nos noms, côte à côte ou l’un au-dessus de l’autre. »
Les miscellanées encerclent l’incandescence de leurs quêtes.
On ressent l’essentialisme. Les gloires des ultimes confidences.
L’amitié fronton, la complicité exemplaire et bénéfique.
« Faster » le trait d’union entre l’avant et l’après.
On avance à deux plus vite et en grandeur.
« Tout enfant est un adulte inconnu. »
Comme le dit si bien les Éditions La Contre Allée, « Faster », « ne peut que nous mettre en joie ».
À noter une couverture symbolique avec un circuit « tout droit sorti de l’enfance et sinueux. »
Eduardo Berti acclame la glorification de l’enfance en apothéose.